La Cour européenne des droits de l’homme a récemment (20 décembre 2016) rendu un arrêt où elle interprète les articles 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l’homme. Ces articles consacrent le droit au respect de la vie privée et familiale (article 8) et le droit à un recours effectif (article 13).
Les faits de la cause à l’origine de cet arrêt peuvent être résumés comme suit : le fisc suédois suspectait que d’importantes sommes avaient été soustraites de l’impôt par 3 sociétés suédoises au moyen de transactions illégales avec une société suisse. Les autorités suédoises ouvrirent une enquête afin d’investiguer sur cette fraude fiscale présumée. Cependant, les sociétés suspectées ayant récemment été liquidées, le fisc considéra que les visites domiciliaires devaient intervenir à des adresses liées au dirigeant des sociétés. En l’espèce, des perquisitions eurent lieu au sein du cabinet d’avocats des sociétés suspectées ainsi que dans un appartement appartenant à la société-mère desdites sociétés. Cet appartement était habité par un avocat associé du cabinet précité.
Plusieurs documents (clef USB, disque dur,…) furent saisis au sein de l’appartement. Le cabinet d’avocats, estimant que lesdits documents étaient couverts par le secret professionnel, forma plusieurs recours à l’encontre de la perquisition et des saisies sur base des articles 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l’homme.
S’agissant du droit au respect de la vie privée, la Cour de Strasbourg considère que les investigations effectuées dans les locaux du cabinet d’avocats constituent une ingérence dans son droit au respect de son domicile mais que les investigations effectuées à l’appartement ne constituent pas une telle ingérence. Selon la Cour, les données saisies au sein de l’appartement n’appartiennent pas au cabinet d’avocats. La Cour conclu que la saisie ne portait pas atteinte au droit du cabinet d’avocats protégé par l’article 8 de la Convention. La Cour rappelle ici sa jurisprudence constante selon laquelle une interférence au droit au respect de la vie privée ne peut être justifiée que si elle est prévue par la loi, qu’elle poursuit un but légitime et qu’elle est nécessaire dans une société démocratique. Ces conditions étant, selon la Cour, respectées en l’espèce l’article 8 n’est pas violé.
Par contre, la Cour conclut à la violation de l’article 13 de la Convention en raison du fait que, les visites domiciliaires ayant affecté le cabinet d’avocat, celui-ci possédait un intérêt légitime à obtenir un contrôle du respect de ses droits garantis par la Convention. Or, en l’espèce, le cabinet d’avocats s’est vu refuser tout recours et n’a donc pas pu soulever ses griefs relatifs à la visite domiciliaire. La juridiction suédoise considérant que le cabinet d’avocats n’avait pas un intérêt suffisant à agir contre la décision d’autorisation de la mesure de perquisition et de saisies.
On le voit, la jurisprudence de la Cour de Strasbourg pose, à nouveau, des limites aux pouvoirs d’investigation du fisc. Il convient de les avoir à l’esprit lors de tout contrôle fiscal.
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